Restauration d’art, un métier de passion

Domaine Public, Les Noces de Cana de Paolo Caliari dit Veronese (1528-1588) - Musée du Louvre

Notre conférencière, historienne d’art et professeur à l’Ecole du Louvre, nous a permis de découvrir le travail des artisans du patrimoine, une des richesses de la France.

Les musées partagent avec le public les résultats de la restauration d’une œuvre d’art, voire organisent in situ cette opération afin que les visiteurs observent les artisans au travail. En quoi consiste la restauration d’une œuvre d’art, qui prend cette décision, quels outils les restaurateurs ont-ils à leur disposition et quelle déontologie prévaut aujourd’hui ? Voici quelques secrets, bien gardés, de la restauration des peintures et sculptures de nos musées.

D’abord, un constat général de l’état de l’œuvre est réalisé. Il est suivi d’un projet et d’un programme en plusieurs étapes. Quinze à vingt personnes, des experts de renommée internationale, se réunissent pour décider d’une restauration, dont le directeur ou le conservateur du musée sont décisionnaires. Elle doit obéir à un schéma bien précis pour assurer la stabilité des travaux, la lisibilité, c’est-à-dire pouvoir reconnaître facilement ce qui a pu être restauré et leur réversibilité, au cas où des techniques nouvelles pourraient intervenir dans le futur. Tout ceci dans un cadre bien précis.

Quelques exemples d’œuvres restaurées au Musée du Louvre :

HERMAPHRODITE ENDORMI : la restauration « intégrative » où l’on refait des éléments manquants -matelas et oreiller, pieds en intégralité- effectuée en partie par Le Bernin.

VENUS DE MILO : sa première restauration a été faite en 1821 et la deuxième en 2010 pendant la nuit, les jours de fermeture du musée et sans déplacer la statue. Le remplacement des bras fût proposé mais refusé par le directeur du Louvre. En bas de l’épaule on peut voir deux petits trous de fixation où se trouvait accroché un bracelet.

Quant à LA VICTOIRE DE SAMOTHRACE restaurée entre septembre 2013 et début 2015, des photos réalisées avec des UV ont permis de voir sa structure métallique, en effet les ailes sont en plâtre et composite. Un badigeon ou enduit jauni datant du XIXe a nécessité un nettoyage fait de compresses de pulpe de papier et d’eau, elles seront ensuite retirées à l’aide d’un couteau en plastique.

D’autres exemples de travaux de restauration sur des statuettes en bois polychromées ou des peintures nous ont été décrites, montrant les limites de ces restaurations parfois audacieuses comme l’exemple de LA CHARITE d’Andréa del Sarto peinte sur bois, décollée par un processus chimique, et transposée en 1750 sur une toile par Robert Picault, aujourd’hui fragilisée par ce nouveau support. A partir du XVIIIe siècle ce genre de transposition ne sera plus exécuté.

LES NOCES DE CANA, de Véronèse toile monumentale de 70m² restaurée en 1990 par six restauratrices sur place. Les couleurs jouent un rôle majeur dans ce tableau et les restauratrices ont su retrouver la couleur originale du manteau du maître de cérémonie, à droite en bas du tableau, qui de rouge est redevenu vert. Les Noces de Cana

En conclusion, ce fut un voyage passionnant autour d’une vingtaine d’œuvres qui nous a fait découvrir un métier d’art autour de la conservation, la restauration d’un patrimoine en péril, fait de passion, de patience et d’ingéniosité.

Par France Bussière, Marina Lafosse et Nicole Parlange – Paris Insolite